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Critiques et perspectives

La perplexité que nous avons ressentie devant la complexité de nos observations et de leur analyse, nous a ramené sans arrêt aux problèmes de placement et de méthodologie évoqués dans notre introduction.

Nous arrivions avec des présupposés, un désir de vérifier nos hypothèses, de trouver du sens. Il nous a fallu patiemment les oublier, les moduler, les retrouver, en s’efforçant de se laisser continuellement imprégner par les paroles circulantes.

L’aspect de l’observation des fœtus auquel nous tenions beaucoup s’est révélé une utopie. Nous étions nous aussi à l’extérieur du ventre de la mère, confrontés à des images fuyantes, qui ne nous apprenaient rien sur le partage de ce ventre maternel par les fœtus. Seules résonnaient les paroles prononcées par les parents sur leurs futurs enfants.

L’évidence première de notre axe différenciation - gémellisation s’est trouvée, à mesure que notre travail avançait, recouvrir d’autres pistes plus profondes et tout aussi passionnantes à étudier :

• Dans le cadre général de l’échographie obstétricale, nous pouvions reprendre les cas spécifiques d’annonce de handicap, qui bouleversent les représentations parentales et s’interroger alors sur le rôle de contenant que joue ou non l’échographiste ainsi que celui de double contenant qu’occasionnellement nous avons pu prendre ;
• Dans le cadre plus restreint des grossesses multiples, nous pouvions nous intéresser aux influences culturelles dans le positionnement maternel face au phénomène de la gémellité, phénomène que nous avons entrevu avec les nombreuses femmes africaines, consultant à l'hôpital ;
• Toujours dans le cadre des grossesses multiples, nous avons été particulièrement frappés par l’importance de l’inscription dans la chaîne trans générationnelle d’une grossesse multiple, lorsqu’elle est spontanée. Cette grossesse nous a semblé s’inscrire dans un continuum générationnel : il y avait déjà des jumeaux dans la parenté. Si l’on suppose que l’accueil de cette grossesse trouve un support dans l’histoire de la famille, le fait d’être une grossesse spontanée jouerait alors un rôle dans la préparation de la future mère à la situation de triade. Au contraire, dans un contexte médicalisé d’AMP, l’irruption d’une grossesse multiple échappe au cycle des générations déjà existant et prend une autre dimension. Ainsi, nous avons pu entendre des parents rationaliser après-coup ce surcroît de fertilité et certains regretter de ne pas avoir de triplés… Dans l’idée que cette irruption de plusieurs enfants à la fois leur permettait " de rattraper le temps perdu ", soit les années de stérilité.
• De la même manière lorsque la mère est multipare et qu’elle a déjà fait l’expérience d’une dyade, elle semble mieux préparée à l’accueil d’une naissance multiple, lorsqu’elle est primipare (ce qui est le cas de la plupart des grossesses par AMP), la grossesse multiple paraît potentialiser la difficulté de passage à l’état de mère.
• Du point de vue des projections parentales sur le couple gémellaire, la plus significative nous a paru ce phénomène de projection idéalisée du couple parental sur le couple gémellaire. Elle pose la question du narcissisme des parents, blessé ou non dans le recours à l’AMP, réparé ou non par ce surcroît de fertilité, idéalisé et projeté sur le couple gémellaire.

  Ceci pourrait faire l’objet d’un futur travail.

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