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LES CONJONCTIVITES

Symptôme banal, souvent méconnu sur le plan étiologique en raison de la diversité des traitements à disposition des professionnels, la conjonctivite peut avoir diverses formes étiologiques, symptomatiques, et avoir diverses conséquences en cas de "mauvais traitements".

CAS CLINIQUE

- Monsieur M. se réveille un matin avec la paupière gonflée, une sensation de chaleur sur les deux yeux, parfois un point localisé ou une sensation de corps étranger et souvent des sécrétions blanches ou verdâtres qui accrochent les cils. Parfois l'abondance des sécrétions pourra coller les deux paupières, et il faudra de l'eau pour réussir à ouvrir les yeux...

L'affection en général bilatérale peut être asymétrique ou retardée sur un œil par rapport à l'autre.

- Si la symptomatologie n'est pas trop importante, il commencera par demander avis à son pharmacien. Si celui-ci est responsable, il ne donnera pas un traitement antibiotique local mais seulement un traitement antiseptique ou le conseil d'aller voir son ophtalmologiste.

Ce traitement antiseptique ne sera pas toujours (ou rarement) efficace et monsieur M. ira alors voir son généraliste ou l'ophtalmologiste en urgence.

CHEZ L'OMNIPRATICIEN

Quels peuvent être les premiers gestes à faire quand un médecin généraliste est confronté à une conjonctivite ?

- D'abord reconnaître la conjonctivite

sans avoir recours aux instruments dont dispose l'ophtalmologiste.

La seule rougeur de la conjonctive bulbaire ne signe pas la conjonctivite.

  • On peut la voir dans le glaucome aigu : mais là, en palpant le globe au doigt, en observant la pupille en semi-mydriase, la perte visuelle, la cornée trouble, le diagnostic sera fait.
  • On peut la voir dans les kératites, les ulcères cornéens : il faut alors disposer de fluorescéïne, en instiller une goutte et rechercher une plage verte sur la cornée, en lumière blanche. Associée à une photophobie et à une rougeur limitée au pourtour cornéen, respectant la conjonctive palpébrale, le diagnostic sera fait.
  • On peut la voir dans les épisclérites qui donnent une rougeur limitée et un peu plus profonde, triangulaire à base limbique, accompagnée d'une légère douleur à la pression (comme si on appuyait sur un hématome).

La conjonctivite, qui est une inflammation de la conjonctive bulbaire et palpébrale, sera diagnostiquée sans matériel en éversant la paupière inférieure avec le doigt, en l'éclairant avec une simple lampe et en constatant l'épaississement et la rougeur.

On pourra compléter l'examen en retournant la paupière supérieure et en l'éclairant ; on verra alors le même épaississement, parfois on verra des papilles serrées les unes contre les autres, (ou on découvrira un corps étranger irritant).

Le tout pourra être accompagné de sécrétions plus ou moins abondantes.

Mais là encore comment reconnaître une conjonctivite bactérienne d'une conjonctive virale ou allergique.

Il ne faudra pas hésiter à recourir au frottis conjonctival (qui sera fait par le laboratoire)

  • pour identifier le germe si le traitement ne marche pas.
  • pour s'appuyer sur l'antibiogramme si le premier traitement prescrit à "l'aveugle" ne marche pas.

Enfin, garder à l'idée qu'une conjonctivite qui démange, ne secrète pas beaucoup (ou pas du tout) et qui dure plus de 15 jours, a toutes les chances d'être allergique.

D'abord affirmer la conjonctivite.

Ensuite la reconnaître.

Puis la bien traiter.

CHEZ L'OPHTALMOLOGISTE

Après un interrogatoire :

  • sur les circonstances de survenue qui pourront éliminer un traumatisme ou un corps étranger ;
  • sur les antécédents médicaux ou infectieux locaux (rhino-pharyngite, pouvant influencer la pathologie infectieuse), on examinera le patient à la lampe à fente.

L'acuité visuelle est le plus souvent normale. Parfois un dépôt sur sa cornée pourra gêner et s'effacer au clignement.

L'examen physique révèlera les signes de la conjonctivite :

  • Les paupières sont rouges, gonflées.
  • La conjonctive bulbaire est rouge de façon diffuse sans localisation particulière dans la forme simple.
  • La conjonctive palpébrale supérieure, (en retournant la paupière supérieure) et inférieure (en la déplissant) sont gonflées, le siège de micro hémorragies ponctuées, et d'aspect papillaire serré sur la conjonctive tarsale supérieure - parfois on retrouvera des follicules.
  • La cornée pourra être le siège d'une complication par frottement des papilles sur celle-ci, à type de kératite ponctuée superficielle ou par infiltration microbienne superficielle. Parfois on aura un aspect rond d'abcès bactérien de la cornée (quand la conjonctivite peut avoir traîné longtemps).
  • La chambre antérieure est généralement calme dans la forme simple. Elle peut être remplie de cellules inflammatoires (Tyndall) Elle peut voir apparaître un niveau de pus (hypopion) témoignant d'une endophtalmie.
  • L'examen de la tension oculaire et du fond d'œil seront généralement normaux.

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

Il devra se faire, au cabinet de l'ophtalmologiste, par l'examen au biomicroscope ; avec :

  • une inflammation conjonctivale localisée à type de sclérite ou épisclérite.
  • Une kératopathie (pathologique cornéenne) pouvant induire un cercle périkératique (rougeur autour de la cornée).
  • Une inflammation intra-oculaire (iritis - iridocyclite, uvéite antérieure) qui peut aussi donner une rougeur de la conjonctive bulbaire à dominante périkératique.
  • Un glaucome aigu par fermeture de l'angle, qui s'accompagnera, outre la rougeur oculaire de son cortège de signes (céphalées, œdème cornéen, semi-mydriase).
  • Un corps étranger cornéen qui provoquera également une pathologie.

DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE

1) Par l'examen anatomique

  • On pourra reconnaître une conjonctivite allergique par la présence de follicules, de prurit intense ; par l'absence de sécrétion.
  • On pourra reconnaître une conjonctivite virale par la présence d'un chémosis associé à des follicules, par la présence de ponctuations cornéennes.
  • On pourra reconnaître une conjonctivite bactérienne par les signes précités et par le deuxième temps de prélèvement.

2) Par l'examen bactériologique

Un frottis conjonctival accompagné d'un antibiogramme pourra permettre un diagnostic biologique.  Le pus sera prélevé par un coton monté, dans les culs de sac conjonctivaux supérieurs et inférieurs et mis en culture. Cet examen sera fait au laboratoire. Il permettra de mettre en évidence la présence à l'examen direct et après culture de germes avec prédominance de :

  • Staphylocoque doré le plus fréquent (souillure par les mains sales).
  • Streptocoque pneumoniae.
  • Entérobactéries.
  • Moraxella ... etc...,

puis permettra la réalisation d'un antibiogramme nécessaire à la mise en route d'un traitement adapté.

TRAITEMENT

Il sera instauré, d'abord à l'aveugle. Il consistera, en cas de conjonctivite isolée importante, en un collyre antibiotique à large spectre (quinolone, sulfamide, béta-lactamine....), que l'on prescrira de 4 instillations jusqu'à 6 instillations par jour selon l'importance, pour une durée de 6 à 7 jours continus.

Ce traitement sera réajusté, en cas de nécessité, en fonction du résultat du frottis et de l'antibiogramme qui parviendront dans les 48 heures..

On associera, en cas de complication locale, soit un collyre cicatrisant ou mouillant, soit un collyre anti-inflammatoire non cortisoné. Face à une inflammation interne on pouura associer un traitement cortisoné local et parfois un dilatateur irien qui empêchera l'accolement irido-cristallinien, conséquence de cette inflammation.

Les traitements antibiotiques généraux associés seront réservés aux endophtalmies importantes.

Symptôme apparemment banal, la conjonctivite peut avoir des conséquences inattendues d'où la nécessité d'une consultation spécialisée, d'éviter un traitement à l'aveugle et de ne pas négliger les signes associés.

BIBLIOGRAPHIE

Philippe Baron

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